A Noël, la paix véritable nous est donnée !
21 décembre, 2015   //   Par :   //   billets, eglise, droit canonique   //   1 commentaire   //   5061 Vues

Noël est la fête de l’enfance par excellence ! Pour les générations passées, et dans leur prière et dans leur foi, l’enfance du Christ avait une grande place ; moins aujourd’hui. Pour comprendre et méditer sur le mystère de l’enfance de Jésus, il nous faut méditer sur notre propre enfance : temps de la découverte du monde, dans la joie, dans les larmes, temps de l’apprentissage de la vie, de l’enthousiasme, temps de découvertes, temps de la confiance par excellence. L’enfant vit en totale dépendance de ses parents.

Dieu a voulu vivre ce temps de l’enfance ; non pas seulement comme une incidence à son incarnation, une annexe, une conséquence accessoire à sa venue dans notre monde. Il est vrai que dans les évangiles, nous passons des évangiles de l’enfance aux évangiles de la vie publique en quelques versets. Nous oublions trop souvent (même si nous le savons intellectuellement ou théologiquement) que Jésus a passé 30 ans de sa vie, caché, vivant son quotidien : une vie de famille, une vie d’ouvrier, une vie sociale, selon les contingences de ce monde. C’est en le recevant dans nos propres existences, dans nos contingences, que nous pourrons l’imiter vraiment.

L’enfance de Jésus n’est pas seulement une fête, liturgique ou sociale, en plein de mois de décembre. L’enfance du Christ fut comme toutes nos enfances : elle a duré dans le temps, elle a eu ses joies, ses jeux, sa nécessaire éducation, son apprentissage, ou encore ses peines comme le décès de Joseph (nous l’oublions souvent). En tout cela, le Christ rejoint notre vie au quotidien : il a voulu vivre toutes les étapes de notre vie humaine.

Dieu vient !

Dieu vient ! Non pas en rêve ; non pas en conte ; non pas en idée ou en concept. Dieu vient, réellement et concrètement. Nous annonçons sa naissance en ce monde, comme nous faisons mémoire de nos anniversaires réciproques. Élisabeth s’est réjouie de cette naissance : entrons dans cette même joie. Dieu vient ; et Il vient dans la paix et par la paix … même si nous ne pourrons pas ignorer que ces fêtes seront marquées par l’année que nous venons de vivre. Ne nous le cachons pas. Mais au-delà de toute misère, de toute souffrance et de tout défaitisme, nous pourrons toujours en faire le lieu d’une espérance et d’une paix renouvelées, même au cœur des évènements du monde.

Quand le prophète Michée nous annonce (ce fut la 1ère lecture du 4ème dimanche de l’avent) la venue du Messie, ce futur roi que tout Israël attend, il nous l’annonce sobrement par une naissance de paix : « jusqu’au jour où enfantera celle qui doit enfanter (…). Lui-même sera la paix ! » (Mi 5, 2.4a). Dans la nuit de Noël, résonne une autre parole, à laquelle nous préparons nos cœurs ardemment, celle de l’évangéliste Luc : « Paix aux hommes que Dieu aime ! ».

En accueillant le Fils de Dieu à la crèche, nous ne ferons jamais un vœu pieux ; nous ne commémorerons jamais un rêve irréalisable … Non ! Nous ferons mémoire du seul évènement qui a indubitablement changé le monde et qui le change encore : la véritable venue de Dieu sur terre, dans sa naissance, mais aussi dans sa croix et sa résurrection. Cette naissance sera l’occasion de nous réjouir de la même joie qu’Élisabeth. Dieu vient … et la paix authentique, toujours frêle et vulnérable en nos mains, ne nous vient que du Christ. Avec lui et à son exemple, il nous appartiendra de la donner autour de nous, afin que la puissance de vie l’emporte toujours sur les puissances de mort.

La paix véritable

Pourquoi Jésus est-il né ici-bas ? Jésus vient nous sauver, répétons-nous au fil du temps et de nos liturgies. Il vient nous sauver de nos péchés, de notre mort. Mais cela est à une condition : que nous ayons envie de suivre cet enfant. Le problème fondamental de notre humanité n’est pas nécessairement dans son péché ; mais qu’elle persiste à vouloir se sauver elle-même ou à croire que le Ciel, le Paradis lui est un dû. Or – et Noël nous le montre bien – un cadeau ne se mérite pas, ne se doit pas ; il se reçoit. Un cadeau n’est jamais un dû, mais un don ! Or, aujourd’hui, pour beaucoup de nos contemporains, de chrétiens même, le Ciel, notre salut, est souvent un dû. Mais encore une fois, le salut suppose cette condition : que nous voulions être sauvés par Jésus et que nous acceptions ce salut, dans toute notre existence, c’est-à-dire que nous acceptions le regard de vérité de Dieu sur nos vies.

Quand Isaïe annonce la naissance d’un futur roi, celui que tout Israël attend, il nous dit : « Comme il est beau de voir courir sur les montagnes le messager qui annonce la paix. » (Is 52, 7). Or, la paix de Dieu est une paix véritable : vérité dans la paix ; mais vérité aussi chez ceux qui l’accueillent. La paix est vraie ou elle ne l’est pas. Vouloir la paix de nos sociétés n’est aussi qu’à ce prix. Tout est dit sur l’expression de la paix et de l’amour de Dieu à la crèche, sur sa tendresse envers les hommes : il donne sa paix !

Après la blessure du péché originel et le dévoiement de l’image de Dieu, nous sommes tous marqués par cette réalité la plus profonde du cœur humain : la peur de Dieu. Consciente ou non, elle habite nos cœurs et immobilise souvent l’amour, tout comme Adam et Eve : « l’homme et sa femme se cachèrent devant Dieu. » (Gn 3, 8). Cette crainte est née par la blessure directe du premier péché : en un instant, l’homme est passé d’un Dieu-Père entre les mains duquel on joue comme un enfant, à un Dieu juge dont on fuit la face … drame de la faute et méconnaissance du Père des Cieux. Dès lors, nous imaginons Dieu comme un despote jaloux, en une caricature de l’image de Dieu qui va être la plus dure à extirper du cœur de l’homme.

Le seul remède à cela est l’enfance : enfance du Christ qui nous donne l’image d’un Dieu tout « petit » et « accessible » ; enfance de l’homme qui refait confiance à son Père. Pour redécouvrir le Cœur réel du Père et nous laisser réapprivoiser, nous avons reçu le pouvoir de devenir enfant de Dieu, à l’image du Fils de Dieu lui-même. Dieu nous invite à éliminer peu à peu cette peur qui nous tient loin de lui : c’est d’abord cela la définition de cette paix promise et qui nous est donnée aujourd’hui. La distance mortelle mise entre Dieu et nous, Dieu lui-même ne l’a pas supportée et il l’a vaincue par sa propre enfance. C’est pourquoi les anges s’adressent aux bergers en leur disant : « ne craignez pas ! ».

Dieu veut venir réparer cette blessure en nous (parce qu’il s’agit bien d’une blessure !) de la crainte de Dieu. La crèche est profondément un lieu de guérison : que peut-on craindre d’un tout petit ? Dieu vient en notre monde par une naissance humaine, au fond d’une étable, pour que nous nous laissions attendrir par lui, que nous retrouvions ce chemin de l’amour tout simple de l’enfance et de la confiance : nous ne le faisons plus ! On ne s’approche jamais d’un enfant sans que cela ouvre notre cœur. L’enfant ne s’impose pas : il s’accueille. Ce n’est pas lui qui forcera le premier vos bras pour y venir s’y blottir. Nous n’avons pas à nous étonner que ce soit les pauvres, les bergers, qui les premiers viennent reconnaître leur Sauveur. Notre Dieu de tendresse se comporte avec notre pauvreté et nos péchés comme un aimant envers un autre aimant. Il est attiré par nos pauvretés et toutes nos fausses routes. Prenant notre humanité, Dieu nous montre la meilleure manière de l’accueillir et de lui ressembler : en devenant enfant.

La crèche est pauvre et tout à fait banale. Le signe de Dieu est là : c’est dans la banalité quotidienne, voire même dans la pauvreté, que nous le rencontrons. C’est l’enjeu d’une conversion : accepter cette pauvreté à laquelle Dieu nous appelle.

Père Cédric Burgun

1 commentaire pour “A Noël, la paix véritable nous est donnée !”
  • suzanne
    22 décembre 2015 -

    Mon Pere, deux enfants meurent chaque jour en France sous les coups des adultes , dans un silence assourdissant, sans parler de ceux qui n’en meurent pas mais ne s’en remettent jamais .Et cela se passe dans tous les milieux sociaux, probablement meme chez certains catholiques. ..Jesus aimait tellement les enfants. Il doit souffrir beaucoup lui aussi.
    Avant d’etre handicapee, j’allais a la messe presque tous les jours .Je n’ai jamais entendu un pretre faire allusion a cela dans son homelie . Je prie pour que cela arrive !Merci .